La Nativité: Le mur de séparation est renversé

Aux vêpres de la Nativité nous chantons l’hymne suivant :

« Venez, réjouissons-nous dans le Seigneur.
Le mur de séparation est renversé,
le glaive flamboyant est déposé,
et moi, je participe aux délices du Paradis,
car l’Icône immuable du Père divin,
prend forme d’esclave en naissant d’une Mère vierge ».

Quel est ce mur de séparation ? Ce mur s’est érigé lorsque l’homme, pour avoir voulu se faire l’égal de Dieu, fut exilé du Paradis. L’entrée du Paradis fut alors gardée par un ange à l’épée de feu, ou au « glaive flamboyant », pour en interdire l’accès. Le Créateur avait laissé l’homme entièrement libre : si tu manges de ce fruit, sache que tu connaîtras la mort. La liberté est ici fondamentale, car sans elle il ne peut y avoir d’amour. À la mort est lié tout ce qui rend pénible le destin humain lorsqu’il est mêlé de souffrance, de découragement, d’angoisse, de tristesse à l’idée d’être arraché à cette vie qui pour la grande majorité des hommes constitue le bien le plus précieux.

Dans sa compassion en effet le Créateur voulut briser le mur de séparation d’avec les êtres qui étaient le fruit de son amour. Il y eut d’abord la longue durée de la patience de Dieu qui, par la voix de ses prophètes, par le combat pour la foi des justes de l’Ancien Testament, s’est rapproché à petits pas de sa créature jusqu’à ce que, lorsque les temps furent venus, une humble femme, timide et rayonnante dise : « Je suis la servante du Seigneur ». Elle nous devance, car nous aussi pouvons devenir servantes et serviteurs du Seigneur. Ce beau mot de « serviteur » désigne celui, ou celle, qui par son baptême est digne de servir, de se faire selon la Bible « ami » de Dieu.

Recevons donc cette parole de la Nativité nous invitant à être dans la joie car Dieu le premier a renversé le mur de séparation entre les mondes. Le fossé entre Dieu là-haut dans les cieux et l’homme vivant ici-bas sur terre, ce fossé a été comblé lors de la naissance de l’Enfant à Bethléem. Déjà le prophète Isaïe en avait le pressentiment lorsqu’il chantait : « Ah ! si tu déchirais les cieux, et si tu descendais ! » (Is 63,19). Avec la manifestation du Fils du Très-Haut dans une humble crèche, le ciel s’est déchiré, Dieu est devenu proche, intime même avec les hommes. Nous avons dès lors accès à Lui directement dans notre cœur –  « vous êtes les temples de l’Esprit Saint », écrit saint Paul -, nous pouvons communier au repas sacré où Il se donne Lui-même en nourriture pour faire de nous des « théophores », des porteurs de Dieu, et partager cette joie avec le monde qui nous entoure.

***

À l’aube de l’Année Nouvelle nous sommes invités à faire un bilan sur nous-mêmes. Comment avons-nous vécu l’année écoulée, quelles décisions nouvelles allons-nous prendre en ce tournant de l’année, quels sont les murs de séparation que nous devons abattre dans notre vie : rapports avec les membres de notre famille, dans notre milieu d’étude ou dans notre milieu professionnel, dans notre environnement humain, dans notre engagement dans la vie de notre Église, dans notre indolence spirituelle ? Comment pouvons-nous mettre le Christ au centre de notre existence, Lui qui s’est dépouillé de sa divinité pour devenir ce serviteur souffrant et chargé de toutes nos fragilités ? Y a-t-il en nous des murs qui nous séparent des autres, nous enferment en nous-mêmes ? Sainte Thérèse de Lisieux disait : si tu fais un pas vers Dieu, Il est alors si content qu’Il fait dix pas dans ta direction !

Le monde où nous vivons est profondément tourmenté, en proie à des séductions malsaines, à de terribles actes de violence. Or il est clair que ce monde, le Christ l’aime. Il s’y est manifesté pour lui apporter des paroles de paix et de joie. Dans sa vulnérabilité, la Nativité nous montre comment les murs de la haine, de la violence, du mensonge, de la corruption, peuvent être renversés.

La Nativité c’est le temps de la pureté, de la beauté de l’enfance. Or l’enfance, aujourd’hui, est bafouée, exposée à des visions qui ne sont pas de son âge. Les jeunes souffrent dans les familles désunies où les valeurs de paternité ont disparu, ils se conduisent parfois comme des adultes et, devant l’angoisse de la vie, deviennent violents à un âge de plus en plus tendre.

La Nativité c’est une famille qui, dans sa pauvreté, erre dans les rues d’une petite ville à la recherche d’un abri pour la mère qui doit accoucher. Sommes-nous conscients de cette condition d’errance dans le monde – c’est aussi la nôtre – où nous rencontrons des êtres seuls, parfois privés de foyer, à qui nous pouvons offrir des secours matériels et humains ?

La Nativité, c’est aussi une famille vulnérable, menacée par les tyrans de ce monde qui n’hésitent pas à massacrer des Innocents, lorsqu’ils craignent de voir leur échapper le pouvoir. L’innocence paie toujours pour les crimes des puissants. Deux camps se font face : celui de la lumière, avec la Sainte Famille, les bergers, les mages, et celui des ténèbres plein de férocité. Lorsque Dieu se rapproche des hommes, on assiste à une recrudescence des forces du mal, les anges des ténèbres mobilisent leurs troupes. C’est peut-être ce à quoi nous assistons aujourd’hui. Quoiqu-il en soit, nous sommes responsables de ce monde, non dans sa globalité, mais au moins dans le petit carré où il nous est donné de vivre, où nous pouvons nous émerveiller des beautés qu’il recèle, des joies que Dieu nous offre de partager, et où nous aimons proclamer, comme dans cet hymne de Noël :

« Venez, réjouissons-nous dans le Seigneur ».

Puisse cette joie remplir le cœur de tous au seuil de la Nouvelle Année.

Père Michel

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